Une transformation discrète
Nous sommes en pleine construction de programme pour nos Journées de l’Architecture et du Développement Urbain Durable – JADD.
Dans ce cadre, nous sommes allés à l’inauguration de la transformation de la chapelle de l’hôpital de Frederiksberg car nous considérons l’inclure au programme des visites.
Nous avons choisi d’écrire un article sur le sujet pour les raisons citées par les curatrices du projet l’historienne de l’art Marianne Krogh et l’architecte Sidsel Gelting Hodge lors du discours d’inauguration.
“Lorsque les bâtiments transformés devront à l’avenir pouvoir être transformables, il ne fait pas sens de travailler de façon trop rigide. C’est pourquoi notre approche a consisté à nous rapprocher lentement du bâtiment, à passer beaucoup de temps sur place, à observer de près matériaux et détails, et à analyser et discuter ensemble pour déterminer ce qui est le mieux pour le bâtiment et le jardin. D’un point de vue économique, nous avons déplacé les moyens des matériaux vers les heures de travail humaines : le temps et la proximité de tous les acteurs ont été privilégiés par rapport à de nouveaux achats. On peut dire que nous cherchons à renouer avec une tradition constructive où le temps, le savoir et le soin sont au centre», expliquent Marianne Krogh et Sidsel dans le journal de l’association des architectes:
En somme, tout l’enjeu a consisté à révéler la qualité intrinsèque du bâtiment, tout en mettant au défi chaque corps de métier de l’altérer le moins possible.
Sur le terrain de l’hôpital de Frederiksberg se trouve la chapelle de l’hôpital, datant de 1954. De l’extérieur, elle ressemble à une maison individuelle dessinée par un architecte, avec une cour et un jardin bien agencés. Tant le bâtiment que le jardin semblent un peu négligés, et l’histoire ainsi que les intempéries y ont laissé leur empreinte. Seuls quelques éléments trahissent l’ancienne fonction du bâtiment: la hauteur sacrale du plafond de la pièce principale, la lumière très modeste provenant des quelques fenêtres et surtout, dans le sous-sol froid, des étagères de quelques mètres de profondeur.
La rénovation a été réalisée par groupe d’architectes, d’artistes, d’artisans et d’autres intervenants qui ont exploré jusqu’où il est possible d’aller en nettoyant, taillant, traitant et retravaillant les matériaux déjà présents : pierre, maçonnerie, surfaces, portes et fenêtres. Ils n’ont utilisé que ce qui pouvait être « glané » sur le site, sur d’autres chantiers avoisinant, dans les caves de la chapelle, etc.
L’Association (danoise) des Architectes a invité les architectes, artistes et artisans les plus prometteurs du moment, au projet de rénovation. Ceux-ci ont démontré comment, avec un budget très limité et une approche attentive aux ressources, il est a été possible de transformer ce lieu vers de nouveaux usages. Le défi a été aussi de transformer un lieu de culte sans connaitre la fonction qu’aurait ce nouveau bâtiment.
Un exemple pionnier pour inspirer le développement d’un nouveau quartier
Au-delà de cet exercice de style (parfaitement réussi), la transformation de la chapelle constitue une prise de position radicale en donnant le ton de la première étape de la réhabilitation du quartier de l’hôpital de Frederiksberg en quartier habitable. Le projet se veut un exemple de démarche durable en matière de transformation. “Rénover, transformer et réutiliser les bâtiments n’est pas seulement une tendance, mais une nécessité, selon le directeur de l’Association (danoise) des Architectes”, Lars Autrup.
La transformation discrète
Pour un œil non averti, il peut être difficile de percevoir l’usage possible d’un tel bâtiment. Néanmoins, l’exercice a démontré avec brio qu’il était possible d’apprendre à mieux aimer ce qui existe déjà, y compris ce que nous considérons a priori comme laid ou sans valeur.
Concrètement, le groupe a travaillé à renforcer les qualités originales du bâtiment à travers de petites interventions. La décoration initiale du portail a été réinterprétée pour de nouvelles fonctions. Les briques endommagées ont été réparées en laissant visibles les traces de leur âge et de leur usure, et le bâtiment a été repeint en respectant les couleurs originales.
Parallèlement, l’architecture a été rendue plus ouverte et accueillante. Une grande fenêtre provenant d’un bâtiment avoisinant a été restaurée et réutilisée dans la façade, permettant à la lumière naturelle de pénétrer dans le bâtiment. Le jardin a été ouvert sur le voisinage et la haie qui délimitait auparavant l’espace privé a été retirée pour favoriser de nouvelles connexions et rencontres.
Les trois équipes:
Le groupe pluridisciplinaire est composé de trois équipes sélectionnées à travers un appel à candidatures pour mener la transformation.
Équipe 1 : L’agence Verna, l’artiste plasticienne Julie Falk et l’autrice et géographe culturelle Emmy Laura Pérez Fjalland.
Équipe 2 : L’agence “A Part of Sum”, l’artiste et charpentière Line Hvidbjerg et l’architecte et apprenti-maçon Lasse Buus. La créatrice artisanale Karoline Bachlar y contribue également.
Équipe 3 : Hahn Lavsen, l’artiste Rasmus Søndergaard Johannsen et la licière (tisserande sur métier) Marianne Noer.
Nous nous interrogeons sur la pertinence de montrer ce bâtiment, dont les codes architecturaux très minimalistes parlent à un usager danois. Susciteront-ils le même intérêt auprès d’un regard étranger lors d’une découverte de Copenhague.
Les matériaux trouvés sur le lieu sont entreposés à l’extérieur de la chapelle dans le cadre de l’exposition
Pour conclure :
La transformation de la chapelle de l’hôpital de Frederiksberg illustre avec justesse comment l’architecture peut conjuguer mémoire et renouveau. En privilégiant la patience, le soin et la réutilisation des ressources existantes, ce projet réaffirme qu’il est possible de bâtir un futur durable sans effacer le passé.
Cette démarche sensible et exemplaire résonne pleinement avec l’esprit de nos Journées de l’Architecture et du Développement Durable (JADD) 2026, où seront mises à l’honneur des initiatives qui repensent la transformation urbaine avec humanité et respect du patrimoine.
👉 En savoir plus sur les JADD 2026
